Journal de Bord

La description détaillé au jour le jour du voyage de 5 ans du voilier Yallah! Un voilier GibSea 34 au départ du Lac Champlain, les préparatifs, la descente du Hudson et le voyage vers la Floride par l'Intracoastal. La traversée vers les Bahamas et la descente jusqu'au Venezuela et le retour à St Paul de l'Île aux Noix.
Des anecdotes, des guides nautiques, des cartes, des trucs...quoi faire ou ne pas faire, les mouillages...des bons et moins bons endroits!

samedi 27 janvier 2001

Rum Cay/Abraham Bay, Mayaguana

La météo annonce dans les prochaines 24 heures l’arrivée non pas d’un autre ¨Cold Front¨, ¨ mais des premiers vents du S E qu’on attendait depuis notre traversée de Miami, sauf que maintenant on s’en passerait bien. L’ancrage sera absolument intenable, et il n’y aura pas d’autres îles ayant un ancrage avant Mayaguana qui elle, est à 130 miles de distance. Donc, les 5 voiliers sans se consulter ont pris la même décision et font voile pratiquement ensemble. Après 2 heures de route, le vent forcit et tourne plus tôt que prévu vers l’Est, les voiliers peinent et le Catalac 37 retourne vers Rum Cay.  Une heure plus tard, les deux autres voiliers abandonnent et changent aussi de cap vers Rum Cay, nous apprendrons plus tard qu’ils y serons prisonnier 12 jours! Nous avons de plus en plus de difficulté à maintenir notre route et surtout de rester à proximité de ¨Sol¨. Mais le vent se remet à changer de direction et maintenant nous filons au nord de Samana que nous passerons en pleine nuit. (Nous n’en verrons que l’écho sur le radar…Christophe Colomb n’avait pas ce luxe, maintenant je comprends mieux quant certains historiens comparent l’ampleur du voyage de Colomb à celui de l'expédition vers la lune!) Toujours en pleine nuit nous croisons les Plana Cays, ou il n'y a qu'un village abandonné et arrivons enfin, 24 heures après notre départ à Mayaguana.
Il était temps parce que nous sommes fatigués et que les conditions sont maintenant réunies pour faire des gaffes. D’ailleurs, à l’approche de l’ancrage, nous décidons qu’il est trop dangereux d’accès et nous préférons mouiller dans un ancrage secondaire avec aucune protection et très rouleur, nous y passerons 2 nuits. Une fois bien reposé, nous retournons essayer notre premier choix de mouillage et maintenant, bien reposé et avec une nouvelle optique, l’entrée à travers la barrière de corail se fait assez facilement. Nous nous ancrons dans 4 mètres d’eau, entourés de têtes de coraux, face à l’océan dont les vagues viennent se fracasser 30 mètres devant nous…et nous sommes ¨presque¨ confortable.
Dans le mouillage d'Abraham Bay, sa tire!
Le vent continue de souffler E SE, 15 à 25kn, après 7 jours, la météo nous annonce une accalmie dans les 10kn, on déplace les voiliers à l’entrée de la barrière de corail, pour pouvoir sortir d’ici en pleine nuit. Mais les vents continuent de souffler toute la nuit à 25kn, nous restons donc sur place à se faire brasser copieusement. L'avantage c'est que pour la première fois l'éolienne fait vraiment sa "job", les batteries sont pleines!
Le lendemain matin, on retourne s’ancrer derrière la barrière de corail, on va enfin pouvoir dormir!
N.B. : Mayaguana, est une très grande île avec 3 villages pratiquement à l’abandon, habités en majeure partie que par des vieux. Le dock est inaccessible, même en annexe. Un deuxième dock abandonné, plus utilisé depuis la fermeture d’une base spatiale américaine, tombe en ruine. L’aéroport lui aussi construit par les Américains est à moitié fermé, les pistes se recouvrant graduellement de végétation. L’île est pourtant très grande, en fait la plus grande des Bahamas,  la culture des ananas en était le revenu principal, à part la base, aujourd’hui, rien n’est cultivé! En fait, Mayaguana résume un peu la situation de la plupart des îles de l’archipel des Bahamas.
27 janvier au 4 février 2001

jeudi 25 janvier 2001

Georgetown/Rum Cay,Bahamas

Hier après midi, pour profiter de l’angle du soleil, nous nous sommes déplacés vers la sortie de la baie de Georgetown à Fowl Cay, face à la mer. Nous partons à 07h00 et tricotons à travers les hauts fonds et les bancs de coraux…il y’en a partout!   Après une heure, assez ¨stressante¨ nous hissons les voiles et en compagnie de 4 autres voiliers dont le Catalac 37, qui ont pris un passage différent, nous filons avec ¨Sol¨ vers Rum Cay. Nous y arrivons en fin d'après-midi après une très belle journée de voile et nous ancrons près du ¨village¨.   Après 3 essais on réussit à bien accrocher, mais le mouillage est excessivement rouleur et le vent souffle sans arrêt.
L'entrée pour la marina de Rum Cay.  Photo: rumcayvacationrentals.com

Le lendemain, nous débarquons sur l’île en espérant envoyer nos ¨Pocketmail¨, ¨ mais les 2 téléphones de la place sont disparus, il ne reste que les cabines…c’est drôle, le village comptait 2 téléphones, il n’en reste rien mais par contre ils ont les moyens d’avoir 3 bars pour 50 habitants!
25 au 26 janvier 2001

jeudi 11 janvier 2001

Staniel Cay/Farmer's Cay/Georgetown, Bahamas

Nous avons enfin une fenêtre météo et quittons l’ancrage très rouleur de Staniel, depuis 3 jours le ¨swell¨ était devenu carrément intolérable, après avoir chassé évidemment en pleine nuit, nous nous sommes déplacés 2 fois mais sans résultat.  Heureusement que c'est la pleine lune, donc les manœuvres sont pas trop "risqués".
Le mouillage de Farmer's Cay, Bahamas
 Donc c’est sans regret que nous quittons l’ancrage vers Farmer’s. Nous y arrivons dans l’après-midi après une très belle traversée sous voile. Nous entrons dans la baie, évitons le banc de sable très évident (si le soleil est au rendez-vous!) et naviguons dans 3 mètres d'eau en gardant une quinzaine de mètres de distance entre nous et un récif…et nous nous échouons sur un haut fond parsemés de ¨patates¨! ¨Sol¨ qui nous suivait passe à, a peine 3 mètres de nous sans problèmes mais finalement fait demi tour parce que le ¨port¨ de Farmer’s est très ouvert au nord. Nous resterons accrochés aux cailloux pendant une dizaine de minutes avant de réussir à pencher le voilier suffisamment pour le dégager, il fallait faire vite parce que la marée était descendante, les vagues et le courant nous poussait encore plus vers le haut fond. Nous retournons vers l’entrée de la baie et nous nous ancrons dans 5 mètres d’eau, complètement épuisés. Mais la force du courant nous incite à encore une fois changer de mouillage et nous nous déplaçons vers une mini-baie, ou nous sommes obligés de nous ancrer juste à l’entrée dans à peine 2 mètres d’eau, face à l’océan avec encore un fort courant, mais le fond à l’air de mieux tenir. C'est vraiment un mauvais endroit pour mouiller, les courants venant des deux "passes" font qu'on arrête pas de tourner, de tirer sur notre mouillage, pourvu que sa tienne!  Pour ne prendre aucun risque, exceptionnellement, je mets les deux ancres.  Nous allons quand même prendre le temps de visiter le ¨village¨, selon un des guides, ça devrait nous donner une idée de certaines îles polynésiennes… je pense que le guide devait avoir abusé de la poudre blanche! Il n’y a RIEN qui vaille le déplacement, c’est presque un village fantôme ou en voie de le devenir. À moins que la Polynésie ne soit qu’un ramassis de carcasses de 4X4, de hors-bord abandonné et de cabanes plus laide les unes des autres.
11 janvier 2001

Après avoir passé une nuit merdique à dormir sur une oreille, nous quittons enfin notre ancrage à 07h15 vers la mer, il ne fait pas encore jour, mais la proximité de notre mouillage nous permet de le faire en toute sécurité. Nous avons 40 miles à faire avant d’arriver à l’entrée de Georgetown, et il faut que nous y soyons avant l’après-midi si nous voulons entrer dans la passe ou nous avons 3 miles avec 5 changements de cap à faire sans que le soleil nous éblouisse et nous empêche de voir les hauts fonds et les têtes de corail. L’eau dans la baie est turquoise et d’une transparence inouïe. Je vois de loin, un dauphin sous l’eau se diriger vers nous, nous apprendrons plus tard que c’est le seul dans le coin et qu’il fait pratiquement parti des attractions touristiques de l’endroit, il vient même jouer avec les gens qui se baignent autour de leur bateau ancrer à ¨Hamburger beach¨. Nous n’aurons pas cette chance parce que nous préférons nous ancrer devant ¨Sand Dollar beach¨ qui est mieux protégée et plus proche de la ville.
Le mouillage "Sand Dollar Beach" devant la ville de Georgetown
Pendant la durée de notre arrêt à Georgetown nous aurons 2 ¨cold fronts¨ et nous n’aurons pas à nous déplacer de notre mouillage, au contraire des autres endroits ou nous assistons à un va et vient continuel de bateaux à la recherche de l’endroit le plus confortable pour les conditions météo du moment. Évidemment qu’il existe de meilleurs ancrages, mais ils sont depuis longtemps pris par les habitués…on nous a montré un endroit ou le voilier présent revient chaque année depuis 30 ans!
La "marina" de Georgetown avec un catamaran Catalac de 30'
Facile à comprendre, ici la météo est plus clémente et la plupart des ¨cold fronts¨ meurent en cours de route. (Chaque hiver, il y a en moyenne 45 ¨cold fronts¨, seulement 3 se rendent à Mayaguana au sud des Bahamas.) La ville, (550 habitants) est entourée de belles plages et à courte distance de coraux pour les mordus de la pêche. En plus, la ville à les services essentiels, épiceries, marchés, banque, gaz propane, gasoil, aéroport, téléphones fonctionnel…donc c’est presque le Nirvana. L’endroit est sécuritaire, pratiquement personne ne cadenasse son annexe, en fait certains exagèrent…un jour, au dinghy dock, j’ai aperçu une annexe pleine de sacs d’épiceries avec son ordinateur portable bien à la vue de tout le monde, facile après d’accuser les Bahamiens de se laisser tenter.
L'île de Georgetown, côté Atlantique.
Profitant d’une belle journée, nous sommes allés faire le tour de l’île au vent, (notre ancrage) nous avons marché le long de la plage qui est superbe et traversé sur le côté océan ou les vagues venaient s’écraser sur les rochers dans un bruit assourdissant, nous y avons trouvé le spectacle désolant d’un voilier de 35 pieds échoué sur la plage une semaine auparavant. Paraît que le capitaine s’était endormi au commande (cause assez commune) et c’était retrouvé sur la plage sans dommage, mais écœuré il est retourné aux USA, une semaine plus tard le voilier avait été totalement déshabillé, l’électronique, les winches, tout, même le mât était disparu!
Nous avons continué notre marche et sommes revenu vers les ancrages de ¨Volleyball beach¨ ou la plupart des habitués de longue date, ancrent leurs bateaux dans 2 lagons complètement fermés…que font ils avec les ¨chiottes¨? Nous avons dû traverser un petit bras de mer dans 1,3 mètres d’eau à proximité des voiliers ancrés et au moment où je me retourne vers France, pour voir comment elle se débrouille pour traverser, je vois à 2 ou 3 mètres, un petit requin nager vers elle, je la tire de la en 4e vitesse! Un peu plus loin, en marchant dans 10cm d’eau, le sable se met à bouger sous mon pied et une raie de s’enfuir.   Disons que nous avons décidé d’écourter notre marche…
Pendant notre étape ici, ont a le temps de faire du "social" et de visiter un Trawler, même par mer calme ça roule!  On visite aussi un catamaran, un superbe Catalac 37...un condo flottant.  En plus on lie connaisse ou on revoit les Scape II, Weekend, Abitibi et Vent d'Ange que nous avions rencontré soit aux USA ou à Nassau.  On rencontre aussi un couple "Tex-Mex" avec leur fille de 7 ans sur un beau Beneteau 44CC.  Il y'a des Mexicains qui ont du "bacon"!
L’endroit est agréable, mais il nous faut penser à partir parce que les vents dominants du nord vont bientôt tourner et seront de plus en plus en provenance du Sud, Sud Est, ce qui pour le reste de notre voyage n’est pas l’idéal, surtout pour notre traversée vers les Turks & Caïcos, la République et Puerto Rico. (On est jamais satisfait, maintenant on VEUT des ¨cold fronts…mais pas trop fort!)
N.B. : Chez ¨Exumas Market¨ vous pouvez recevoir et envoyer des ¨fax¨, recevoir du courrier et des paquets, ils se chargent de les retenir jusqu’à votre arrivée. Autres choses intéressantes à Georgetown, chaque matin sur le ¨Net¨ organisé par les plaisanciers américains, ¨Exumas Market¨ annonce les paquets arrivés, la météo marine est retransmise, les offres et demandes de services etc etc. Très pratique quant vous êtes loin de tout et que vous avez un problème, chiro, cartes marines, problèmes mécaniques, conseils météo pour ceux qui veulent continuer et quitter ¨Chicken harbour¨ pour les ¨Fars Out Islands¨ ou là, il n’y a RIEN de RIEN.
12 au 24 janvier 2001

lundi 1 janvier 2001

Norman’s Cay/Warderick Wells/Staniel Cay, Bahamas

Enfin! La nouvelle année nous amène du beau temps. Nous en profitons pour nous baigner pour la première fois depuis la rivière Hudson. J’en profite pour inspecter le dessous du bateau, très facile avec la clarté de l’eau qui est extraordinaire. Bonne chose à faire, parce que l’anode à recommencer à se desserrer donc à ne plus faire son travail de prévention électro-chimique.
Nous ferons aussi une bonne récolte de lambis. C’est excellent, mais beaucoup de travail à extirper de sa coquille la ¨bête¨ et de la nettoyer, France en fait un véritable carnage. Il faut aussi faire abstraction de son apparence, si on veut en manger. Nous en mangerons en ¨fritters¨ en salade et en paella…excellent!
Les vents s’étant calmés encore plus, nous décidons de partir vers Wardrick Wells (parc national des Exumas) le 3 au matin. Une journée extraordinaire, sous voiles.
Le mouillage de Warderick Wells
 Nous arrivons tôt dans l’après-midi et après discussion météo avec des gens d’expérience nous devons malheureusement prendre la décision de poursuivre notre chemin dès demain matin. L’endroit n’offrant pas de protection suffisante pour le nième ¨cold front¨ annoncé pour le surlendemain.  Comme préparatif France prépare un Civet de Lièvre pour prendre un "break" sur les lambis.
1 au 3 janvier 2001
Nous faisons route donc vers Staniel sous voile dans des conditions idéales. Mais déjà 2 gros nuages menaçants nous attendent au-dessus de l’île. Il commence à pleuvoir et le vent passe de 15kn à 20/25kn mais surtout la visibilité tombe de plus en plus. On se remet au moteur pour essayer d’entrer dans l’ancrage. Heureusement que nous y arriveront avec une lumière acceptable, parce que l’entrée de la baie est parsemée de têtes de corail, bancs de sable etc.
Les hauts fonds à marée basse...
Nous nous ancrons derrière l’île et pendant 2 jours, le vent sifflera sans arrêt. Yallah! lui se comportera comme un métronome, bercé par les vagues et les courants contraires. 
Le calme revenu nous en profitons pour aller visiter le village (55 habitants), nous verrons notre premier requin en train de somnoler au pied du dock à dinghy, Il doit être en train d’attendre son premier touriste! L’eau ici est d’une clarté exceptionnelle, même la nuit avec la lune nous voyons le fond. Mais contrairement à Norman’s l’eau ici est totalement vide de vie, pas de poissons, pas de lambis. La baie à été depuis longtemps ¨nettoyée¨ de ses habitants.
La partie riche du village!
En parlant d’habitants, ce qui surprend à Staniel, c’est que contrairement à la plupart des villages pauvres dans le monde, ici les gens n’élèvent pas de poules ou de cochons. Derrière les maisons, la seule chose présente est les carcasses de Seadoo ou de VTO et les bouteilles de bières vides. Un des attraits de Staniel est la fameuse grotte ¨Thunderball¨ (du film de James Bond). Les guides la comparent avantageusement à Amalfi ou Capri. Facile d’accès en snorkel, nous y sommes entrés à marée basse par une journée ensoleillée. Spectaculaire! L’eau claire, la luminosité et la multitude de poissons de toutes les couleurs en font endroit magique. Nous y avions apporté une tranche de pain…France a pratiquement disparue sous le tourbillon multicolore provoqué par les poissons en quête d’une miette de pain. 
Une plage pour nous tout seul!
Dommage que nous n’avions pas de caméra sous marine et les 3 magasins locaux n’y ont pas pensé non plus, de toute façon je me demande à quel prix ils auraient osé les proposer. Si je prends l’exemple d’un filtre à l’huile acheté chez Sears à Montréal 8$CAN, ici le même est vendu 29$US ou 43$CAN! C’est dans des endroits comme ici que nous allons voir le bien fondé de se stocker au Canada…même à l’excès.  Pour nous récompenser de cette "grosse" journée France concocte une création: Paëlla au poulet, lambis, chorizo.  Miam!
4 au 10 janvier 2001